La spirale
Des huiles végétales aux fruits et légumes et aux semoules en passant par les produits laitiers, les prix flambent dans des proportions spectaculaires, jamais atteintes, depuis l’ouverture du marché. Les petites bourses en souffrent. Elles le ressentent, au quotidien. Cette situation est-elle irréversible ? Une fatalité ? L’Etat, agent régulateur dans une économie de marché en transition, est-il impuissant face à une telle envolée des prix ? Ces questions, les ménages se les posent. Elles ne trouvent cependant pas de réponse, parce que la manière dont est régulé le marché aujourd’hui est problématique. Le marché «est libre». Les prix aussi. Deux concepts «souples» dans l’esprit des partisans d’une libéralisation plus poussée de l’économie nationale. Et l’envolée des prix dont il est question n’en est qu’une facette. Elle peut même relever de l’ordre normal des choses, dans une économie mal structurée, dans une société civile mal organisée. La situation actuelle des prix risquerait d’empirer si jamais, bien que ce soit peu probable, le prix de la baguette du pain augmentait, comme le souhaitent les boulangers. Il est attendu que ces derniers rencontrent le ministère de tutelle pour en discuter. Le gouvernement semble en être conscient ; il a affirmé récemment qu’il n’y aura pas d’augmentation des prix du lait, du pain et des transports. Les ménages poussent ainsi un ouf de soulagement. Mais est-ce suffisant ? L’Exécutif semble vouloir se ressaisir, se rattraper. Il vient d’installer une commission ad hoc chargée de suivre l’évolution des tendances des marchés, tous les marchés. Ce sera une décision réfléchie, si elle arrive à enrayer la flambée des prix et à identifier les facteurs tenus pour responsables de cette anarchie qui s’est emparée des marchés. Ladite commission aura ainsi un sens. Elle en aura davantage si elle réussit à amener les ménages à se mobiliser, à se défendre contre le diktat de certains commerçants. Il faut dire à ce propos que l’association des consommateurs dont on entend peu parler ne se pose pas en réel défenseur des consommateurs. Amorphes, le sont les actions qu’elle mène sporadiquement. Des organisations de consommateurs dans des pays à économie libérale en viennent à ester en justice des commerçants, des grosses boîtes, des grandes surfaces. La nôtre doit s’en inspirer, ne serait-ce que pour justifier une appellation, un sigle. Sinon, ses actions continueront à se confondre avec le discours béat de ceux qui s’abritent derrière la théorie des marchés au sens large du terme, avec comme conséquence, une flambée en continu, une spirale, et des bourses soumises au régime sec. Cette situation, les ménages n’en veulent pas, quand bien même leurs salaires seraient revalorisés.
Source La Tribune
Le Pèlerin