Le retour des émigrés vide les villages
A Tizi Ouzou et dans les villes de l’intérieur, toutes les plaques numérologiques peuvent être rencontrées: après le 75, le 92 et le 93 ce sont les 59, 83 et d’autres indiquant d’autres pays comme la Belgique, la Suisse et l’Allemagne. Les véhicules sont généralement neufs et font l’admiration des citoyens. Avec un euro de plus en plus fort face à un dinar de plus en plus faible, les émigrés ont désormais acquis l’habitude de dépenser sans compter ou plutôt en comptant en euros.
C’est ainsi que la viande dont le prix, ramené à l’euro, est finalement achetée à un prix dérisoire non plus au kilogramme mais plutôt à la pièce devant l’acheteur local réduit au statut de spectateur. Les émigrés ont aussi participé à une certaine hausse des prix, notamment celle des fruits et légumes. En effet, aux côtés des fêtes qui, cette année avec l’approche du Ramadhan, se sont succédé tous les jours de la semaine, la demande est passée carrément du simple au double en comptant avec la demande des «émigrés» assez importante. L’acheteur local n’aura que ses yeux pour pleurer surtout avec le Ramadhan qui pointe son nez.
Plus que les autres années, une autre habitude s’est faufilée doucement dans le marché algérien. Les émigrés ont constaté que finalement les prix pratiqués sur le marché local sont plus intéressants, car acheter un objet à 100 DA équivaut à avoir le même produit en Europe à 1 euro et ont fait des affaires au pays. Articles ménagers, électroménagers, vêtements et autres textiles se vendent comme des petits pains. Les émigrés achètent et achètent beaucoup selon quelques commerçants et trabendistes rencontrés à Tizi Ouzou. Ces derniers précisant que les émigrés ne marchandent pas.
Une famille d’émigrés habitant la région lyonnaise rencontrée à Tizi Ouzou dira: «Nous préférons nous fournir sur le marché local car les produits sont relativement beaucoup moins chers qu’en Europe. Certes, les vêtements ne sont pas de marque mais pour habiller les petits cela nous arrange beaucoup. Il y a aussi bien des produits comme les articles ménagers qui sont plus appropriés à notre cuisine et qui sont cédés presque pour rien.» Une autre famille habitant, elle, du côté de Strasbourg est rentrée au pays pour la circoncision du petit. «Nous avons fait la fête et vu toute la famille.
Oui, il fait assez chaud mais nous sommes chez nous et en plus on a fait des achats, on a pris un peu de tout de l’alimentation aux vêtements: c’est une véritable affaire. Nous repartons en bateau et en voiture, donc les bagages ne posent pas de problèmes.» D’autres familles sont rentrées pour marier leurs filles. C’est le cas de la famille L. de Boghni dont le vieux père n’arrive pas à exprimer toute sa satisfaction. Il a réussi, comme il dit, «à caser sa fille dans une famille du pays. Les jeunes gens vont, certes, vivre en France mais ils sont de chez nous». Les émigrés, ces «hirondelles d’été», commencent à rentrer: il leur faudra retourner qui à son travail, qui à ses études et comme dit si bien le désopilant Moh Saïd de Maâtkas: «On restera durant toute une année entre nous à nous jalouser et à nous haïr».
Le Pèlerin