Tam-tams à Tam pour des danses à Alger
Un 3ème mandat pour Bouteflika apparaît aujourd'hui presque inévitable. Qui s'y oppose ? L'opposition. C'est-à-dire presque rien.
En Algérie, l'Opposition ne constitue pas une force mais seulement un discours ou une analyse ou une mystique critique. Elle ne réussit pas. Pourquoi ? Selon un fin observateur de la mécanique nationale, cela « est dû au fait que ses chefs ne veulent pas aller en prison », répugnent à l'acte de la rue, ne croient pas l'utilité de la crucifixion et lui préfèrent la pédagogie de l'usure. A la fin, avec des partis ou pas, cela se résume à une opposition « magique » qui croit à la force des mots pour changer le réel et qui approfondit les analyses pour aboutir à l'isolement, au Bouddhisme ou à la vie de monastère. Le résultat cyclique étant une récolte de positions saines, intellectuellement défendables mais concrètement inutiles. Le peuple « comprenant » mieux un émeutier ou un Harrag qu'un opposant chevronné. On peut donc s'opposer contre le « 3ème mandat » mais sans en changer la fatalité et juste pour le « fun ». La partie est-elle donc gagnée ? Non. Certains opposants misent aujourd'hui sur l'autre opposition. Celle qui n'a pas de partis mais des appareils, des réseaux, des affidés et des fidèles. C'est elle qui compte en définitive et c'est celle-là que les scénaristes du 3ème mandat prennent réellement en compte pour négocier, peser, guerroyer ou faire campagne. On ne peut la voir, mais seulement la décrypter et elle ne se manifeste pas par des discours mais par des signes et des présages. Elle peut devenir redoutable car elle n'a pas à être légale, mais elle peut aussi être corrompue car elle n'a pas de morale. Elle active de « l'intérieur » mais reste limitée dans ses mouvements parce qu'elle est à « l'intérieur ». Invisible par définition, elle ne peut servir qu'à rendre visible les contradictions d'un même appareil. Sans agrément, elle se loge traditionnellement dans l'anatomie du « parti unique » et en parasite la morphologie. Sans sigles, elle fonctionne par usage des slogans anonymes et par la confection de campagnes dites déstabilisatrices. Sa force vient de là mais sa faiblesse vient du fait que tout le peuple sait que cette opposition se bat pour elle-même, pour sa propre sécurité alimentaire et que, au Pouvoir, elle ne sera pas plus démocrate que ses adversaires. Le peuple le devine intuitivement, mais la bonne question, à cette altitude, est : « qui se soucie de ce que pense le peuple ? ». Personne. D'où, cette évidence nationale : il n'existe en Algérie, depuis quelque temps, que deux partis politiques : l'un avec Bouteflika, l'autre contre lui. Bouteflika a été élu, ses opposants ont été nommés. D'où sa conviction qu'il est dans le vrai. Où se trouve le peuple entre ces deux parties ? A Tamanrasset, même s'il habite à Alger. C'est pourquoi Bouteflika y est allé en premier : les Algériens habitent tous le fond de l'Algérie, piégés entre le Mali, le GSPC, les réseaux de Marlboro, le paquet de lait à 100 DA et le vide qui dément le darwinisme consacré : tous les hommes descendent d'un chameau ou d'un camion.
Source le Quotidien d’Oran
Le Pèlerin