Château Verdun et Gudanes
Le modeste village de Château Verdun se situe sur la rive droite de l’Aston, affluent de l’Ariège. Ce lieu doit avoir été habité dans un passé très lointain si on en juge par l’étymologie plausible du nom de Verdun, dont le radical dun, d’origine celtique, signifie piton, élévation. Derrière le village, au sud, se dresse en effet un monticule élevé, et difficilement accessible, au sommet duquel se voient encore de vieilles murailles, derniers vestiges du château féodal. L’état lamentable de ces ruines fait présumer que la construction de la forteresse remonte à une époque lointaine, probablement au xc siècle, comme furent édifiés la plupart des autres forteresses de la région.

On possède peu de documents historiques sur ce château. Cependant il semble avoir été habité encore au XIVème siècle, car on relève un seigneur Pierre-Arnaud de Château-Verdun qui fut gouverneur du comté de Foix sous Gaston II : en 1322, les consuls de Foix ayant protesté, devant le juge du comté, contre la violation, par les agents seigneuriaux, des privilèges dont jouissaient lesdits consuls quant à leurs attributions judiciaires, le comte de Foix, empêché, chargea son gouverneur de régler la question.
Antérieurement à cette époque, et en 1244, Garcias-Arnauld et Atho-Arnauld de Castel-Verdun, frères, fils d’Atho-Arnauld, rendent hommage au comte de Foix pour le château de Château-Verdun et tout ce qu’ils possédaient dans la vallée de Siguer.
En 1272, Pons dit le Vieux, condamné pour hérésie, vit sa portion de seigneurie de Château-Verdun saisie et donnée par le comte de Foix à Pons le Jeune.
Un peu plus tard, en 1293, les co-seigneurs de Château-Verdun passent un accord avec le comte de Foix au sujet des mines de fer de la juridiction de la seigneurie.
On ne sait à quelle époque disparut le château de Château-Verdun. Nous présumons qu’il était déjà tombé en ruines sous Louis XIII, lorsque furent rasées la plupart des forteresses de la contrée. Car, déjà avant cette époque, un autre château avait été édifié, un peu plus près de l’Ariège, sur un mamelon appelé Gudanes, ou Gudannes. Cette dernière construction ne paraît pas avoir été bien importante ; on ne possède sur elle aucun document. On relève toutefois que, lors des guerres religieuses, au XVIIème siècle, un seigneur de Gudanes, le sieur Fantillon, partisan des Réformés, en accueillit un certain nombre chez lui, en 1566.
Le domaine de Gudanes passa ensuite entre les mains de l’antique famille noble de Salles dont on relève des représentants au XVII ème siècle. J.-P. de Salles, seigneur de Gudanes, reçut de Charles-Louis de Lourdes la terre de Montgailhard, près de Foix, moyennant une rente viagère. Louis-Gaspard de Salles, seigneur marquis de Gudanes, baron de Château Verdun et d’Aston, fut le dernier marquis de Gudanes. Il eut son heure de célébrité. Ancien maître de forges, on l’appela « Le Roi des Pyrénées ».
C’est lui qui fit construire à la place du vieux castel, au XVIIIème siècle, le château que l’on voit encore aujourd’hui, assez bien conservé, sur ce mamelon agréable d’où l’on jouit d’une magnifique vue sur les environs. Sans prétention d’architecture, cette résidence est imposante par la grandeur de ses bâtiments et leur ordonnance : c’est une construction qui unit une correcte simplicité à un certain air de grandeur et de bon aloi.

Outre la chapelle gothique de l’intérieur, on y remarque la chapelle extérieure de Notre-dame de la Pitié qui, malheureusement, a été endommagée par le feu.
Le marquis de Gudanes posséda, tout d’abord, une grande fortune. Il employait 300 ouvriers dans les forges de Château Verdun. En raison de sa position sociale, il fut l’un des seigneurs les plus importants du Midi de la France et tenait, à Toulouse, des salons renommés où se donnaient rendez-vous les femmes de nobles et de parlementaires qui conspiraient contre la royauté chancelante. On rapporte qu’il avait ses entrées à la Cour de Louis XIV, à Paris, et lorsqu’il allait rendre visite au roi, il entrait dans la capitale à l’aide d’un magnifique carrosse que traînaient des chevaux ferrés en argent, avec des clous d’or. Il fut aussi bien vu de la Cour de Louis XV. Les luttes religieuses, malgré la révocation de l’Edit de Nantes, avaient laissé des ferments de discorde dans la contrée, et des troubles avaient éclaté à partir de 1758. Le comte de Saint-florentin, ministre de Louis XV, écrivait de Versailles, le 3 août 1759, au marquis de Gudanes : « ... le roi m’a paru satisfait de la prudence et de la fermeté dont vous avez usé pour faire tout rentrer dans le devoir... ».
Cependant, malgré son prestige, le marquis de Gudanes était le vassal du seigneur de Lordat, dont le château avait été démantelé sous Henri IV et qui vivait chichement dans le manoir d’Urs, voisin de sa forteresse ruinée ; car le marquis de Gudanes était obligé, selon la coutume, de monter à Urs chaque année, le 24 juin jour de la Saint-Jean, et d’offrir un verre d’eau à son suzerain en signe de vassalité.
Il faut croire que c’est la construction du manoir de Gudanes qui obéra les finances du Roi des Pyrénées, car, dès 1761, il se voit contraint de contracter un emprunt auprès du Trésor Royal, et vingt ans après il n’avait pu faire face à ses engagements. La construction de ce manoir se situerait donc vers le milieu du XVIII ème siècle.
Source : l’Ariège et ses Châteaux féodaux (éditions Résonances)
Le Pèlerin
sarah 08/03/2010 19:56
Le Pèlerin 09/03/2010 05:42