Non-respect des droits de l’homme l’Algérie continue dans le chemin de la régression
L’idée de l’installation de tribunaux spéciaux pour le jugement des criminels, responsables des kidnappings des enfants, a été sévèrement décriée par les avocats, invités hier à la table ronde organisée par le quotidien El Moudjahid, autour de la problématique des droits de l’homme en Algérie.
«Nous avons assez souffert des tribunaux spéciaux de la France coloniale et des pouvoirs successifs algériens depuis l’indépendance. Il est vrai que le kidnapping des enfants est un acte affreux, mais il faut voir celui qui a commis ce crime en tant qu’humain», a déclaré Rachid Ouali, ancien membre du Conseil de l’ordre des avocats à Alger. «Il faut faire attention à certaines déclarations, surtout lorsqu’il s’agit d’engager toute une institution dans des projets scandaleux comme ces tribunaux spéciaux», a-t-il ajouté, avant de dresser un sévère réquisitoire sur la régression des droits de l’homme en Algérie. Il dira que notre pays a brillé ces derniers temps en bafouant la liberté d’expression et de culte. Les procès en cascade contre certains journaux et journalistes sont cités en exemple par l’avocat. Maître Rachid Ouali a également évoqué le procès intenté à Tiaret contre Habiba, une chrétienne accusée de prosélytisme suite à son arrestation en détention de six exemplaires de la Bible. «Ce crime n’existe par dans les textes juridiques mais il semble que l’on a oublié que c’était notre héros l’émir Abdelkader qui a sauvé 10 000 chrétiens d’un massacre sûr par les musulmans à Damas. Où est passée l’époque où le Nord maghrébin était une terre d’accueil des chrétiens et des juifs ?» s’est-il interrogé. «Nous avons fait une grave répression qui a dépassé les limites de la chrétienté», a-t-il ajouté avec regret. «Ce n’est pas l’imam la mosquée du coin, le maire ou le chef de daïra qui décide de l’existence d’une infraction contre la loi ou non», a insisté l’avocat, actuellement conseiller du président de l’Union internationale des avocats. Maître Smaïn Chamma abonde dans le même sens en rappelant qu’un texte de loi garantissant la rémunération des hommes de cultes non musulmans a été adopté par l’Etat algérien au lendemain de l’indépendance. Ledit texte est toujours en vigueur, a-t-il précisé, en dénonçant, à son tour, la multiplication des attaques menées par l’Algérie contre les autres religions. «Des jugements sont rendus dans la méconnaissance des principes fondamentaux de l’Islam dans la compréhension des autres religions», a estimé Me Tahar Bentaleb, avocat à la cour d’Alger. L’intervenant a ajouté qu’«il nous faut un comportement civilisé pour faire appliquer les lois relatives au respect des droits humains dont la plupart des textes des organisations internationales ont été ratifiés par l’Algérie». Ces lois ne semblent pas trouver leur application sur le terrain, à en croire les déclarations de Mme Zoubida Assoul, représentante du réseau juridique des femmes arabes en Algérie. L’intervenante n’a pas omis de parler des droits bafoués de la femme et des enfants. Les invités du débat d’ El Moudjahidont tous constaté l’inadéquation des textes de lois algériennes aux attentes des citoyens qui réclament le respect du droit d’accès au travail, à la santé, à l’eau et à l’enseignement. Pour Me Smaïn Chamma, le pouvoir algérien ne doit pas se révolter lorsqu’il est, à chaque fois, épinglé par les organisations internationales, sur la question du non-respect des droits de l’homme en Algérie. Selon cet avocat, les responsables algériens communiquent mal et lorsqu’ils le font, c’est à travers des communiqués ministériels vides de sens. Les conférenciers ont insisté sur la vulgarisation de la question des droits de l’homme en l’introduisant dans les programmes de l’enseignement dès le cycle primaire. «Le respect des droits de l’homme passe par l’adoption d’un système politique démocratique clair», a conclu Me T. Bentaleb.
Source Le Soir d’Algérie
Le Pèlerin