Sud Algérien - Tassili N’Azdjer
Et si on faisait parler peintures rupestres
On les compte par milliers, voire par dizaines de milliers, les célèbres peintures rupestres du Tassili n’Azdjer. Si elles continuent, à ce jour, à attirer des milliers de touristes et susciter, par la même, la curiosité jamais épuisée, des scientifiques, les messages qu’elles véhiculent ont fait l’objet d’intérêt particulier de la part de nos universitaires, donnant ainsi libre cours à toutes les supputations douteuses et aux théories révisionnistes dont la culture algérienne n’a jamais cessé d’être la cible.
Parler du Parc national du Tassili, et de son extraordinaire richesse archéologique, culturelle, naturelle et historique, c’est risquer de s’égarer, non dans les 80 000 km2 qui font sa gigantesque étendue, mais plutôt dans les pages qu’on s’apprête à rédiger, que même l’espace typographique de tout un journal ne suffirait, à lui seul, à contenir toute la masse d’informations le concernant.
Discours nouveau diront les uns, une pure démagogie rétorquent les autres, en tout cas, au niveau de l’Opnt (Office national du parc du Tassili) de Djanet, l’entreprise, aussi entreprenante soit-elle, suscite un vif intérêt : Faire parler les peintures rupestres dont le Tassili n’Azdjer est, sinon la principale source avec des milliers de fresques. « Il s’agit pour nous aujourd’hui, de donner un sens à ces peintures qui datent de plus de 10 000 ans. C'est-à-dire, les expliquer, les décortiquer pour mettre en évidence les éléments qu’elles nous rapportent sur le mode de vie (habitat, mythologie, religion…) de la population de l’époque», souhaite Salah Amokrane, directeur de l’Opnt. Pour cet éminent archéologue ayant fait le plus gros de sa carrière dans l’autre Tassili, celui de l’Ahaggar au sein de l’Opna (Office du parc national de l’Ahaggar) l’heure n’est plus seulement au recensement et au classement des fresques.
«A ce jour on ne s’est intéressé qu’au traitement quantitatif de l’art rupestre bien que cet intérêt soit légitime à plus d’un titre. Mais aujourd’hui, il faut passer à autre chose. Il y a un travail qui doit se faire pour tenter de percer les messages véhiculés par ces milliers de peintures» insiste-t-il. L’idée parait certes alléchante, mais comment s’y faire ? M. Amokrane nous livre un exemple : «Nous avons à Mertoutek, une peinture représentant un instrument de musique
C’est un outil avec une calebasse. Remonter 2000 ou 3000 en arrière, dans une société où il y avait de la musique c’est, tout de même, quelque chose de fascinant et qui incite à lui trouver une explication. Cherchez dans n’importe quelle encyclopédie et vous ne trouvez aucun élément qui traite de la musique préhistorique dans le Tassili !», clame l’archéologue comme pour remettre en cause le révisionnisme dont l’histoire de l’Algérie n’a jamais cessé d’être l’objet
«On ne peut pas nous faire dire que nous avons une culture arriérée alors que 2000 ans auparavant, nos ancêtres jouaient de la musique ». Pour ce faire, M. Amokrane affiche un optimisme sans fard et appelle de tous ses vœux à l’implication des archéologues, des universitaires et des étudiants algériens pour la mise en pratique de cette vaste entreprise.
Quand on peut, on peut
Louable est, en effet, l’initiative de l’OPNT comme l’est aussi ce regain d’activités visant le renforcement de la protection, la préservation ainsi que la mise en valeur de ce trésor archéologique classé en 1982, par l’Unesco patrimoine mondial, et reste le seul site dans le monde arabe à bénéficier d’un classement mondial dans le registre (patrimoine culturel et naturel). Ce n’est un secret pour personne, et ce ne sont ni les études, ni les centaines d’ouvrages, les travaux de recherches…que le Tassili n’Azdjer constitue de par sa spécificité multiple (historique, culturelle et naturelle) un site d’une rare beauté où «toutes les périodes de l’histoire qui sont représentées avec une densité très importante».
Un bastion de l’art rupestre avec des milliers de fresques dont il est exclu d’établir un inventaire définitif, tant la découverte d’autres peintures se poursuit au grands bonheur pas seulement des touristes ou des scientifiques mais à celui d’une histoire algérienne qui tire ses origines dans les lointaines périodes de la préhistoire.
Le triangle Seffar, Tamrit et Jabbaren dans le plateau du Tassili est la zone où il y a une très forte concentration de l’art rupestre, tout comme celle de Oued Djerrat où l’on compte aujourd’hui plus de 4000 représentations !
« Il y a d’autres peintures que ne nous n’avons pas encore découvert. Personne ne peut prétendre faire un travail systématique dans ce sens. Cela prendra beaucoup de temps » suggère notre interlocuteur.
Aux grands projets les grands moyens
Longtemps dépourvue d’une logistique propre à sa mission, l’OPNT, après la «prise de conscience» des pouvoirs publics, s’est dotée dernièrement de moyens nécessaires à même d’y faire face. «Il y a 4 ou 5 ans, l’OPNT ne
Les moyens matériels seuls ne suffisent pas. Et ce dernier semble en prendre toute la mesure en insistant sur la formation d’agents de contrôle dont le rôle n’est pas seulement réduit au simple contrôle mais, bien au contraire, leur mission, en plus du contrôle, serait d’accomplir un travail de suivi et de préservation de l’ensemble des sites du parc. Cela passe aussi, estime l’archéologue, par la nécessité de renforcer le réseau de contrôle en multipliant les postes de gardiennages pour atteindre une sorte de gestion autonome. Que chaque poste prend sur lui la gestion du site qu’il contrôle.
Source Horizons
Le Pèlerin