Algérie : moins de 10% des 150 milliards de dollars du programme de relance sont allés aux entreprises algériennes
Lancé en 2005, le plan quinquennal de relance économique touche à sa fin. Doté d'une enveloppe de 150 milliards de dollars, ce programme d'investissements publics destiné à moderniser les infrastructures de base du pays sera officiellement clôturé fin 2009. Certains de ses projets ont été livrés, d'autres sont toujours en chantier et connaissent d'importants retards. Mais au-delà du bilan sur les livraisons, ce plan pose un sérieux problème : il n'a pas profité à l'entreprise algérienne. Il a fait le bonheur des groupes étrangers et des fournisseurs extérieurs de l'Algérie.
Le Forum des chefs d'entreprises (FCE) l'a déjà souligné à plusieurs reprises. Les des patrons algériens déplorent régulièrement le recours massif aux étrangers pour réaliser des projets, sans associer les entreprises locales. Selon nos sources, sur les 150 milliards de dollars du plan de relance économique, la part des contrats attribué à des sociétés algériennes est d'un peu plus de 15 milliards. Tout le reste est parti en contrats en faveur de groupes étrangers.
La Chine et la France se sont taillées la part du lion de ce plan. Les groupes chinois de BTP ont décroché la grande majorité des contrats de grands travaux dans les routes, le logement et les transferts des eaux. Et les sociétés françaises sont restées les principaux fournisseurs de l'Algérie, avec des fournitures annuelles variant entre 4 et 5 milliards d'euros sur les cinq dernières années. L'Espagne, l'Italie, les Etats-Unis et l'Allemagne ont également profité du grand gâteau algérien que représente le programme d'investissements publics de 150 milliards de dollars.
Le recours massif aux étrangers pour la modernisation des infrastructures de base et la résorption de la crise du logement et de l'eau a obéit à deux facteurs. Le premier est d'ordre politique lié à la volonté du président Abdelaziz Bouteflika de réaliser «vite et bien ». Disposant d'importantes ressources financières engrangées grâce aux hydrocarbures, l'Algérie a les moyens de sa politique. Le président Bouteflika voulait aussi montrer au monde entier que l'Algérie est définitivement sortie de la crise financière qui l'avait durement touchée durant plus de 15 ans, entre 1986 et 2000. Cette crise avait été provoquée par la chute des prix de l'or noir au milieu des années 1980, l'endettement massif du pays, la dévaluation du dinar au début des années 1990 et le terrorisme islamiste durant la dernière décennie.
Le second facteur est lié à la rareté en Algérie d'entreprises capables de réaliser rapidement de grands projets d'infrastructures d'envergure mondiale. Les entreprises privées, dans leur majorité, ne se sont pas développées et ne n'ont pas investi dans la formation et le renouvellement de leurs moyens de travail. Les sociétés publiques sont souvent confrontées à une situation financière difficile, faute d'une décision claire du gouvernement sur leur privatisation ou leur assainissement financier. Dans le BTP, seuls les groupes Cosider (public) et ETRHB (privé) sont capables de gérer de grands chantiers, mais leurs moyens restent insuffisants devant l'importance des projets lancés en 2005.
Toutefois, le gouvernement, en confiant la majorité des grands projets à des étrangers sans les obliger à associer des groupes locaux ou à transférer de la technologie et du savoir-faire, a manqué cruellement de stratégie économique. La politique du «tout pour les étrangers » et du complexe vis-à-vis des expatriés n'a pas permis l'émergence de groupes algériens capables de rivaliser avec leurs concurrents chinois et occidentaux. Après avoir dépensé plus de 150 milliards de dollars, l'Algérie reste entièrement dépendante du savoir-faire étranger.
Le président Abdelaziz Bouteflika s'est aperçu en 2008 que sa méthode avait échoué. Il a décidé de revoir les règles du jeu en matière d'attribution des marchés publics et d'importations de biens et services. Le premier ministre Ahmed Ouyahia a décidé d'appliquer strictement le taux de préférence nationale de 15% accordé aux sociétés nationales dans les marchés publics. Il a également instruit les décideurs économiques pour prendre toutes les décisions nécessaires afin de réduire la facture de l'importation des biens et services qui a dépassé les 35 milliards de dollars en 2008.
Reste la pratique. Dans les appels d'offres, les administrations publiques ont pris l'habitude ces dernières années de confectionner des cahiers des charges avec des critères favorables aux étrangers. Vont-elles changer de méthodes ? Les patrons revendiquent aussi une part fixe d'au moins 15% des futurs marchés publics
Source TSA
Le Pèlerin
Fethi 03/03/2009 12:36
Le Pèlerin 04/03/2009 14:44