France - La taxe carbone, comment ça va marcher?
Environnement - A la veille d'une table ronde sur la contribution climat-énergie, le point sur cette nouvelle taxe censée sauver le climat...
Quel est le principe de la taxe carbone?
Historiquement, elle fait partie des propositions du pacte écologique de Nicolas Hulot, présenté lors de l’élection présidentielle de 2007, afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre, responsables du changement climatique. L’idée consiste à «faire augmenter progressivement le prix de l’énergie, donc à faire payer ceux qui consomment beaucoup, explique Benoît Faraco, coordinateur changement climatique et énergie à la Fondation Nicolas Hulot. C’est le principe du pollueur-payeur. L’idée est d’inciter les entreprises et les particuliers à réduire leur consommation d’énergies fossiles». Un principe qui fait aujourd’hui la quasi-unanimité. La taxe augmenterait au fil du temps, ce qui inciterait les entreprises et les ménages à anticiper la hausse en investissant dans des appareils moins consommateurs.
Que deviendra l'argent collecté par la taxe?
Selon une première estimation, 8 milliards d'euros devraient tomber dans les caisses de l'Etat grâce à la taxe carbone. Fabienne Keller, sénatrice UMP du Bas-Rhin et présidente du groupe de travail sur la fiscalité environnementale, a affirmé ce mercredi que la taxe carbone ne devait pas servir de «rustine fiscale» et n'est en aucun cas destinée à combler les déficits publics.
«Le produit de cette contribution climat-énergie sera intégralement reversé aux ménages et aux entreprises», a promis le ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo. Reste à savoir sous quelle forme, ce que le gouvernement n'a pas encore tranché.
Quel impact pour le consommateur?
A court terme, une augmentation du coût de l'énergie, de 6 à 7 centimes par litre d'essence et de 1 centime par kw/h pour le gaz. Francis Lalanne, porte-parole de l'Alliance écologiste indépendante, s’en inquiète: la taxe carbone est une «aberration financièrement, écologiquement, mécaniquement, opérationnellement et stratégiquement, écrit-il dans un communiqué. Encore une fois sous couvert de protection de l'environnement, l'écologie institutionnelle veut faire peser sur le dos du contribuable un impôt supplémentaire.»
«En octobre 2007, le président de la République avait déclaré que si la taxe carbone était mise en place, ça se ferait sans augmentation des prélèvements obligatoires. Donc cela devrait entraîner la mise en place de compensation», explique Benoît Faraco.
Cette compensation pourrait être réalisée sous la forme d’un «chèque vert», qui serait remis à chaque ménage, afin de «rendre l’argent, sans pénaliser le pouvoir d’achat» détaille le représentant de la Fondation Nicolas Hulot. Les ménages les plus économes en énergie y gagneraient donc financièrement. Michel Rocard, président de la Conférence des experts chargé de réfléchir à la taxe carbone, estime que ce chèque «sous condition de ressources peut être une meilleure idée», dans un entretien à «Capital.fr». Eric Woerth, ministre du Budget, s’oppose à ce chèque vert: «voilà 30 ans que l’Etat fait des chèques».
Autre difficulté: éviter que la taxe ne frappe trop durement les plus modestes, et ceux qui vivent à la campagne. Selon les calculs de l'Insee, elle représenterait environ 300 euros par an pour une famille avec deux parents actifs et un enfant vivant en milieu rural, contre 80 euros pour un célibataire vivant dans un appartement en ville. La Fondation Nicolas Hulot propose la création d’un fonds de solidarité nationale, pour aider les ménages les plus modestes à investir dans des appareils plus écologiques.
Quel impact sur les entreprises?
Si le Medef se dit «ouvert» sur le principe d’une contribution climat-énergie, l’organisation patronale y pose néanmoins une condition: qu’elle n’entrave pas la compétitivité des entreprises sur les marchés internationaux.
En contrepartie à la taxe carbone, Benoît Faraco préconise la baisse de la fiscalité sur le travail, ce qui encouragerait les entreprises à embaucher.
Quand la taxe serait-elle mise en application?
Lors du lancement du processus de consultations, début juin, le ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo, avait affirmé que la CCE ne serait probablement pas mise en place avant 2011, alors que l'année 2010 avait été initialement évoquée. Benoît Faraco estime quant à lui qu’elle pourrait être présentée en décembre à Copenhague, lors des discussions sur l’avenir du protocole de Kyoto. Un lancement pourrait donc être prévu en janvier 2010, ce dont doute Michel Rocard, qui mise plutôt sur 2011, et précise que «la taxe carbone pourrait bien ne pas être complète et cohérente avant quelques années».
Prochaine étape: une table ronde réunira autour de Michel Rocard, ce jeudi, une quinzaine d'experts (économistes, scientifiques et élus). Ils émettront ensuite un rapport, à partir duquel le gouvernement devra trancher sur la méthode et le calendrier.
Source 20minutes.fr
Le Pèlerin