Algérie - Ould Kablia - «Si les négociateurs d’Evian avaient gouverné, l’Algérie n’aurait pas perdu 40 ans»
Selon Daho Ould Kablia, les premiers contacts remontent à l'année 1955, soit une année après le déclenchement de la guerre de Libération et les négociations officieuses entre les deux parties allaient commencer déjà en 1956, mais Guy Mollet, face aux exigences de Abane Ramdane, a décidé de mettre fin à ces contacts.
Le président de l’Association des anciens du ministère de l’Armement et des Liaisons générales (Malg), Daho Ould Kablia, a animé dimanche une conférence sur les accords d’Evian à la Maison de la culture de Tizi Ouzou. Dans son exposé, il est longuement revenu sur tout le processus d’entame des négociations avec le colonisateur français, leur déroulement et leur aboutissement tout en marquant leurs principales haltes avec des révélations et des documents d’archives inédits. Ainsi, selon Daho Ould Kablia, les premiers contacts remontent à l’année 1955, soit une année après le déclenchement de la guerre de Libération et les négociations officieuses entre les deux parties allaient commencer déjà en 1956, mais Guy Mollet, face aux exigences de Abane Ramdane, a décidé de mettre fin à ces contacts. Première révélation de l’ancien membre du Malg en contredisant ainsi Ali Kafi qui écrivait dans ses mémoires que Abane Ramdane aurait arrangé les choses afin que ces négociations ne soient pas lancées. Le conférencier en s’appuyant sur ses propres archives a évoqué toutes les étapes ayant abouti au lancement des négociations d’Evian en relevant la qualité des négociateurs et surtout la parade de ces derniers à toutes les tentatives de leurs homologues français de faire reculer la partie algérienne sur de nombreux faits inscrits sur la feuille de route comme questions non négociables comme l’unicité du territoire national. Ce que regrette Ould Kablia en premier lieu à l’indépendance arrachée après tant de sacrifices et d’engagements de grands hommes d’Etat comme Krim Belkacem, c’est le fait que ces négociateurs n’ont pas eu l’occasion de gouverner aux destinées du pays malgré leur compétence et leur expérience. Cela a fait perdre 40 ans à l’Algérie selon lui qui n’a pas manqué d’aborder la crise du pouvoir au lendemain de libération du pays. Pour étayer ses dires, il a rappelé que tout se faisait déjà avant l’indépendance en toute démocratie en citant l’exemple de l’adoption par les 34 membres du Conseil nationale de la révolution algérienne (CNRA) quand quatre membres avaient voté contre mais se sont pliés au vœu de la majorité. Le président des anciens du Malg s’est interrogé aussi sur le pourquoi de cette page glorieuse du peuple algérien qui n’est pas enseignée pour les jeunes générations, car pour lui ça relevait du miracle de faire sortir du pays un colonisateur après 132 ans d’occupation. Même les nom-breux essais en histoire, des œuvres sur la guerre de Libération nationale ne sont pas à la hauteur de cette révolution si ce n’est de semer les amalgames allant jusqu’à affirmer qu’en Algérie il n’existe pas d’historiens pour le moment. L’histoire du pays telle que racontée pour le moment relève selon lui plutôt du factuel plus qu’autre chose. Abordant la récente montée au créneau des médias français pour évoquer leur occupation de l’Algérie d’une manière tendancieuse, Daho Ould Kablia lie cela à l’échéance électorale présidentielle de ce pays sans manquer de les accuser de volonté de fuir la reconnaissance des crimes coloniaux dont la France s’est rendue coupable pendant toute sa présence sur le territoire algérien. Dans ce sillage, il a rappelé que le président français Sarkozy a eu droit déjà à une réponse de sa part. Il a accusé même les Français de volonté de devancer l’Algérie pour célébrer son cinquantenaire d’indépendance en multipliant des émissions et reportages très orientés contre le combat libérateur mené par un pays sous le joug colonial. Enfin, le président des anciens du Malg a confié qu’il se mettra bientôt à écrire ses mémoires d’autant plus qu’il est détenteur d’importantes archives inédites qu’il remettra au centre des archives nationales dès qu’il aura terminé de les exploiter.
Source Le Jour d’Algérie Hamid Messir
Le Pèlerin