Algérie – passeport biométrique –Les hésitations du gouvernement, les femmes voilées et l’intégrisme….Le point
Zerhouni met un terme à toute polémique -Le passeport biométrique et les femmes voilées
La veille du lancement des premiers passeports et cartes d'identité biométriques, le gouvernement algérien, même s'il ne le déclare pas ouvertement, prend au sérieux l'éventuelle apparition de certaines résistances chez les femmes voilées et, à un degré moindre, chez certains porteurs de barbe. Cette appréhension s'est dégagée avant-hier, à travers la communication donnée à Constantine par le ministre de l'Intérieur à I’occasion de la rencontre pour la région est du pays, dédiée au lancement de la deuxième phase de cette opération.
Selon Yazid Zerhouni, la susceptibilité des femmes voilées a été prise en charge dans la phase de préparation du lancement de l'opération. Pour preuve, il cite I’affectation, à chaque structure de daïra, d'une femme qui prendra en charge la numérisation des photos des femmes voilées. Un procédé qui évite à ces dernières de “poser” tête nue devant des inconnus.
Reste que le ministre sera muet quant à un éventuel scénario où la femme voilée s'opposera, non pas à se prendre en photo, dévoilée, par un homme, mais au fait que son portrait, tête nue, circulera par le biais des futurs documents biométriques dans des lieux publics.
Autrement dit, le problème risque de se poser en des termes autres que ceux retenus par Yazid Zerhouni. En effet, les adeptes d'un islam rigoureux, disons les proches du wahhabisme, sont contre l'apparition de la femme tête nue sur les photos. Du coup, le fait que le photographe soit une femme ou un homme ne se pose même pas.
Pour les porteurs de barbe, le gouvernement semble avoir laissé le choix aux citoyens. Toutefois, le ministre de l'Intérieur, toujours à partir de Constantine, concédera que le fait de figurer barbu sur de tels documents créera des problèmes pour les concernés, à chaque passage devant les filtres au niveau des aéroports notamment. Un problème ramené par Yazid Zerhouni à sa simple expression technique. Le relief de la barbe, au passage d'un filtre, risque de ne pas correspondre à celui numérisé sur le passeport biométrique obligeant le concerné à se soumettre à d’autres procédés d’authentification. Une façon de dire que c’est dans l’intérêt de ces barbus de se faire prendre en photo numérisée, sans barbe, lors de la confection de la carte et du passeport biométriques.
Source Liberté Mourad Kezzar
Algérie - Biométrie, bureaucratie et intégrisme
Le ministre de l’Intérieur fait la promotion de la carte d’identité et du passeport biométriques. Tout est fin prêt, comme disent les responsables de ce genre de campagne, pour la réussite de l’opération.
Dès novembre 2015, nous devrions être parés de ces inimitables outils d’identification. Ce n’est pourtant pas la contrefaçon qui menace nos documents, mais le fait que des imposteurs peuvent se procurer de vrais documents, qu’il s’agisse de pièces d’identité, de cartes
grises, d’actes de propriété, de diplômes, d’attestations d’ancien moudjahid…
Si ces documents se vendent ou simplement s’offrent, en l’état actuel de la technologie, pourquoi deviendraient-ils inaccessibles parce que leur procédé de fabrication aura évolué ?
Les cartes grises vierges qu’on retrouve parfois par centaines sur les trafiquants de véhicules ou les passeports qui servent à mettre hors de portée de la justice des personnes recherchées pour détournements ne sont pas fabriqués dans des caves par de diaboliques bricoleurs. Non, ils proviennent de coffres-forts de l’administration, par ailleurs très rétive à délivrer une simple fiche d’état civil à l’impuissant quidam.
Cela changerait quoi à un permis de conduire “acheté” qu’il soit plus ou moins sophistiqué ? Qu’est-ce qui sécuriserait une carte d’identité biométrique si la “recommandation” bénéficie du laxisme du préposé habitué à obéir aux injonctions d’en haut ? Une carte avec la vraie empreinte de la main ou même de l’iris, si elle est complaisamment délivrée, reste une fausse carte d’identité. Une vraie-fausse carte d’identité, comme on les appelle.
D’un autre côté, la numérisation du registre de sécurité sociale n’a pas empêché l’empire du passe-droit en matière de prise en charge et celle de la carte grise le trafic de véhicules.
Il est d’heureux Algériens qui mettent bien plus de soin à entretenir et à renouveler la carte de “Club des Pins” qu’à conserver et à renouveler leur carte d’identité. Aux points de contrôle, la première leur confère “plus” de citoyenneté que la seconde. Certaines cartes professionnelles dispensent tout aussi avantageusement de la carte d’identité officielle.
Ce n’est pas moins le retard technique que la bureaucratie, la corruption et le passe-droit qui hypothèquent le progrès de l’administration nationale.
Mais le gouvernement agit comme si la bureaucratie était un simple effet de désuétude technique de ses instruments.
La biométrie, ainsi conçue, comme un objectif, Zerhouni oublie, dans sa campagne en cours, d’en évaluer les incidences en matière de bureaucratie et de fiabilité de l’identité. Par contre, il s’inquiète des appréhensions des intégristes. Jusqu’à tenter de les convaincre qu’une photo sans barbe leur faciliterait les transits internationaux ! Il fallait que l’État manquât de conviction pour être ainsi réduit à brandir “l’astuce” pour plaider l’utilité de sa réforme. Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, il envisage des femmes photographes dans les daïras pour ne pas violer l’intimité de la chevelure de nos pieuses concitoyennes. Les autres, les impies, auront peut-être le choix.
Le gouvernement des fidèles ne peut être aussi le gouvernement de la citoyenneté. Ni du progrès. Pour rester dans le visagisme, tout cela n’est que cosmétique.
Source Liberté Mustapha Hammouche
Le Pèlerin