Algérie - Elections législatives - Les jeunes entre espoir et rupture
Jamais les jeunes algériens n’ont été autant courtisés pour participer aux échéances du 10 mai prochain en jouant sur la fibre sensible de citoyenneté et de devoir envers le pays.
Jusqu’aux dernières nouvelles, la plupart des jeunes ont de tout temps manifesté un réel désintéressement vers tout ce qui est vote, et à plus forte raison tout ce qui a trait à la politique. C’est sans doute ce qui leur a collé cette étiquette de «jeunes non politisés, totalement déconnectés de l’actualité, et des évènements politiques qui animent leur pays».
Pourtant, la réalité est tout autre. Les jeunes Algériens, selon leur degré d’instruction, sont parfaitement au courant de l’acte politique qui s’y pratique dans leur pays. Tous ont un discours politique qui quelque part tient la route. Mais, une chose est sûre, même s’ils confirment, du moins pour la majorité d’entre eux, leur rupture totale et volontaire de la politique et donnent cette apparence, ils ne se dé-sintéressent pas de ce qui se joue sur la scène politique, encore moins de leur avenir.
En effet, en vue des prochaines législatives qui se préparent dans un contexte régional particulier caractérisé par les mouvements de révoltes qui ont secoué particulièrement le monde, et qui sur le plan national a vu l’engagement paisible d’une série de réformes politiques et économiques, la composante des jeunes est fortement sollicitée. Et comme pour une prise de température, de multiples sorties à la rencontre de ces jeunes tout profil confondu, il en est franchement ressorti qu’en dépit d’une prise de conscience politique certaine, il y a une réelle rupture entre le jeune et le politique. Le même constat a d’ailleurs bel et bien été relevé il y a quelques jours par la chaîne de télévision nationale Canal Algérie, dans son émission «Question d’Actu» dédiée aux jeunes et la politique. C’est ainsi que la plupart des jeunes, certains sans emploi et sans situation sociale, n’hésiteront pas à exprimer leur ras-le-bol en affirmant contre vents et marées qu’ils n’iront pas voter car ils ne croient pas en un changement dans leurs conditions de vie. L’un d’eux dira à ce sujet que «le seul vote auquel j’ai participé et que je reconnais est celui pour la réconciliation nationale. Tous les votes se ressemblent, il n’y a que les dates qui changent. Voter ou non, cela ne changera rien en Algérie». Tous déplorent «ne connaître les députés de leur quartier durant toute la durée de leur mandat qu’à l’approche des élections». Une rupture qu’ils justifieront par les promesses non tenues. Et pour prouver qu’ils peuvent exprimer leur citoyenneté autrement que par l’acte de voter, ils rappelleront l’élan de solidarité personnel qu’ils ont apporté lors des inondations de Bab El Oued en 2001, du séisme de 2003 et même lorsqu’il était question d’aller défendre les couleurs nationales à Oum Derman au Soudan en 2009. Par contre, pour les plus instruits d’entre eux, ils s’insurgeront contre cet «intérêt soudain pour les jeunes», auxquels «on s’intéresse juste pour avoir leurs voix». Un intérêt qu’ils considéreront surtout comme un mépris avéré envers eux. Contrairement aux premiers, d’autres affirmeront aller voter et occuper l’espace, mais à condition «de voir d’autres têtes, des gens auxquels on s’identifie, qui expriment nos doléances et nos attentes : le chômage, le logement…». Ce qu’ils attendent des politiques ? «De réels projets de société à la grandeur du pays qui nous encourageront à aller aux urnes». En outre, un autre groupe de jeunes plaidera pour «un rajeunissement de la scène politique algérienne» où il faudra «passer la main dignement aux jeunes porteurs d’idées». Car diront-ils, «si on continue à nous remettre encore et toujours les mêmes têtes, il est sûr que les jeunes ne voteront pas».
Ce sont là autant de témoignages de la jeunesse algérienne qui, force est de constater, qu’elle est loin d’être apolitique et franchement désireuse de prendre part aux décisions du pays pour peu qu’ils renouent leur confiance en les administrations et en leurs politiques.
Est-il nécessaire de rappeler l’appel du président de la République lors de sa visite de travail à Oran, adressé essentiellement aux jeunes, appelant ces derniers à se rendre «massivement» aux bureaux de vote durant les élections législatives du 10 mai pour affirmer leur forte adhésion à la vie politique et «participer à l’édification de la société moderne à laquelle ils aspirent». Estimant à ce sujet que «la jeunesse est l’enjeu majeur de l’avenir du pays».
Source Le Jour d’Algérie Lynda Naili Bourebrab
Le Pèlerin