Algérie - Une jeunesse au chômage
22% des chômeurs algériens recensés par l’ONS cette année sont des jeunes (16-24 ans). On ne discute pas le chiffre général de 10% de chômeurs sur la totalité de la population active, population estimée selon les normes du BIT. Ces chiffres ont été longuement remis en cause l’année dernière par divers économistes, ainsi d’ailleurs que par quelques officiels, qui estimaient que le pourcentage réel se situait autour de 16%, donc bien au-delà des 10% retenus par l’ONS. Ce dernier, accusé d’utiliser ses statistiques pour des objectifs politiques, a cependant défendu sa méthode de travail en renouvelant, pour cette année, la même approche et le même sentiment de satisfaction : le chômage s’est «stabilisé», y est-il dit dans son rapport, et connaît même une légère régression par rapport à 2011, situant ainsi ce véritable fléau de notre société à un niveau européen acceptable. Mais que dire alors de l’effarant pourcentage des jeunes chômeurs sur lequel tout le monde est d’accord pour l’estimer à quelque 22% ? Quel serait-il sans les dizaines de milliers d’emplois créés depuis mai 2011 dans le cadre de la mesure facilitant l’obtention des crédits pour les jeunes prise après les émeutes de janvier et les révolutions arabes ? On se rappelle l’euphorie incroyable du Premier ministère qui publia un communiqué l’été dernier laissant triomphalement entendre que, suite à cette mesure, le chômage avait quasiment disparu ! Ce qui paraît incroyable justement c’est que malgré les milliards de dinars injectés dans cette opération de crédits pour les jeunes, le chômage qui les frappe n’a pas bougé d’un iota. Sans ce que certains appellent «la distribution d’une manne destinée à acheter la paix sociale», le taux des jeunes chômeurs aurait donc été pour 2012, au moins le double, soit 44%... Comment se fait-il ? En tenant compte de l’augmentation de la population concernée, des pertes d’emplois qui ont eu lieu depuis l’année écoulée pour cause de précarité ou autre, et de tout ce que l’on veut, les chiffres auraient dû baisser de manière significative. Or, non, ils se sont «stabilisés» à la grande satisfaction des statisticiens maison de l’ONS. A cette échelle là du phénomène, 22%, il est indécent de parler de stabilité car il s’agit ni plus ni moins que de la perpétuation d’une situation catastrophique. Tout se passe comme si certains responsables chargés du secteur de l’emploi œuvrent au maintien d’un contexte propice aux troubles les plus graves. Une telle persistance du chômage chez les jeunes n’est pas le signe rassurant que des efforts stabilisateurs ont été accomplis mais le constat d’un échec, difficile à comprendre au vu des moyens qui ont été délégués pour l’atténuer. Le problème reste d’actualité aussi bien que ses conséquences éventuelles. A croire ces chiffres, la prise de conscience politique qui semblait être née après janvier 2011 et les mesures qui ont suivi n’étaient que poudre aux yeux. Les gouvernants jouent avec le feu, soit par incompétence pure et simple, soit par un désir (qui reste à clarifier) de régler leurs propres comptes internes via une proportion importante de jeunes désœuvrés et donc, à défaut du meilleur, prête au pire. Qu’à Dieu ne plaise !
Source Le Jour d’Algérie Brahim Djalil
Le Pèlerin