Algérie - Thermalisme et thalassothérapie - Un secteur vierge
Le thermalisme reste un secteur peu exploité malgré la richesse du patrimoine thermominéral algérien.
Il existe quelque 202 sources thermales à l’échelle nationale, mais seulement 7 grandes stations thermales médicalisées et un centre de thalassothérapie. «Les pouvoirs publics ont fait un très grand effort d’investissement durant les années 1970, qui a abouti à la réalisation de ces sept stations et de ce centre de thalassothérapie. Ce programme a été achevé dans les années 1980 et, malheureusement, il n’ y a pas eu un autre programme de développement par la suite. La Tunisie qui a commencé à construire ces stations en 1994, en est actuellement à plus de 40 centres de thalassothérapie», nous a expliqué Baroudi El-Fachouch, médecin thermaliste et conseiller qualité au Centre de thalassothérapie de Sidi- Fredj, en marge d’une conférence qu’il a animée lors de la deuxième édition du Salon international des vacances, des loisirs et du bien-être. Ces sept stations thermales sont implantées au centre (01) à l’est (02) et à l’ouest du pays (04). La plupart de ces établissements publics ont été dotés, ces dernières années, de toutes les commodités en matière de structures d'accueil (hôtels, bungalows familiaux, appartements, studios), d'installations et d'équipements médicothermaux (établissements de soins), ainsi que d'un encadrement professionnel. Ils sont également conventionnés avec les différents organismes de sécurité sociale (Cnas, Casnos, Camssp) et accueillent, entre autres, des curistes assurés sociaux pour des cures thermales d'une durée de 21 jours. La grande majorité de ces stations est donc implantée à l’ouest du pays et est gérée par l’Entreprise de gestion touristique de Tlemcen. La plupart avaient été construites par des français et ont été modernisées par la suite à l’instar de la station thermale de Hammam Bouhanifia dans la wilaya de Mascara. Celle-ci a été construite en 1936 par quatre actionnaires français dont un médecin. «En 2002, nous l’avons modernisée, en achetant des baignoires jacuzzi, et nous avons amélioré les massages sous l’eau. Nous avons également acquis des vibromasseurs», nous a fait savoir Noureddine Chalal, kinésithérapeute à la station de Hammam Bouhanifia. Cette station comprend également quatre grands hôtels.
La station de Hammam Boughrara située dans la wilaya de Tlemcen et mise en exploitation en 1974, comprend un hôtel, un ensemble de 14 bungalows, un ensemble de 02 villas et un restaurant. La station de Hammam Bouhdjar située dans la wilaya de Aïn Témouchent, a été mise en exploitation en 1974. Elle comprend un hôtel, un ensemble de 54 bungalows, un restaurant et un snack. La station de Hammam Rabbi, dans la wilaya de Saïda, a été mise en exploitation en 1970. Elle comprend 13 bungalows pour familles dont un (01) luxueux (VIP) et 12 studios chambres doubles. Les deux autres stations médicalisées situées à l’est du pays sont Hammam Guergour dans la wilaya de Sétif et inauguré en 1987, et Hammam Meskhotin dans la wilaya de Guelma. La station de Hammam Salihine se trouve, quant à elle, dans la wilaya de Khenchela. On ne compte qu’un seul centre de thalassothérapie qui se trouve à Sidi-Fredj (Alger).
Encourager l’investissement privé
Il faut qu’il y ait des mesures incitatives pour encourager les investisseurs privés à lancer des projets de centres de thalassothérapie ou de stations thermales.
Selon le Dr Baroudi El-Fachouch, médecin thermaliste et conseiller qualité au centre de thalassothérapie de Sidi-Fredj, il y a eu un début timide avec le privé. «Actuellement, il y a la station de Hammam Mélouane qui vient d’être prise par un privé. Il y a aussi un centre de balnéothérapie privé à Bouchaoui et de petites stations thermales à l’intérieur du pays, mais elles ne sont pas médicalisées.» Et pour lancer des projets de stations thermales autour de chaque source, notre interlocuteur estime qu’il faut que l’Etat facilite l’accès aux financements mais également qu’il y ait un cahier des charges pour un minimum de qualité. «Lors des assises nationales du tourisme, nous avons posé la problématique du développement du thermalisme et de la thalassothérapie. L’Etat veut encourager l’investissement privé. Donc actuellement, il doit uniquement jouer un rôle de régulateur», a-t-il indiqué. Pour encourager l’investissement privé, notre interlocuteur estime qu’il faut d’abord sensibiliser tout le monde, à commencer par le président d’APC qui a une source au niveau de sa commune. «Le P/APC doit protéger les sources thermales de sa commune et attirer des investisseurs pour construire une station autour de cette source. Pour le moment, il y a tout ce travail qui reste à faire.» Selon le Dr El-Fachouch, chaque source thermale est source de richesses car on peut construire une station autour. «Si on prend l’exemple de Bouhanifia, cet endroit s’est développé autour d’une source thermale. Avant, il n’ y avait rien, juste une source, des bains, un établissement de soins et ensuite on a construit un hôtel et un restaurant. Et après toute une ville s’est développée autour. C’est devenu un lieu de richesses», a-t-il rappelé. «Nous avons un avantage par rapport à nos voisins, nous avons des endroits qui sont encore naturels. Et actuellement, les gens fuient les villes et cherchent des endroits sauvages et non pollués. Donc si nous avons une vision du développement de ce secteur, elle doit se faire dans ce cadre-là. Il faut également être savoir que beaucoup de demandes ont été déposées au niveau du ministère du tourisme pour la réalisation de stations thermales ou de centres de thalassothérapie», a-t-il ajouté. Selon notre interlocuteur, le thermalisme et la thalassothérapie peuvent avoir «un grand avenir dans notre pays à condition qu’il y ait un développement harmonieux». Il faut savoir que les gens choisissent les stations thermales pour retrouver le calme, estime t-il. «Donc, si on installe une usine polluante à côté de ces stations, personne ne viendra. Il est très important alors que le président de l’APC sache qu’autour d’une source thermale, il ne doit pas y avoir de pollution, même sonore. Les tunisiens ont développé le thermalisme et la thalassothérapie car ils ont su protéger les sources thermales. Et c’est ce qui fait la différence avec nous, pourtant nous avons le même climat», a-t-il expliqué.
Une forte demande
Les stations thermales et centres de thalassothérapie attirent de plus en plus de curistes.
La plupart des stations sont devenues, au fil du temps, des lieux très fréquentés par les curistes-touristes et des visiteurs, venus des quatre coins du pays mais aussi de l’étranger notamment durant les week-ends et les vacances mais aussi en saison estivale.
Cet engouement pour le thermalisme s’explique par le fait que ces eaux qui jaillissent du sous-sol, un véritable don de la nature, répondent à tous les traitements hydrothérapiques.
En effet, leur thermalité qui a atteint parfois 72°C, est associée à une composition physico-chimique. Ces eaux sont oligométalliques, bicarbonatées calciques et fortement radioactives, nous a expliqué Noureddine Chalal, kinésithérapeute à la station thermale de Hammam Bouhanifia. Notre interlocuteur nous dit que la valeur thérapeutique des eaux de la station thermale de Hammam Bouhanifia attire de nombreux curistes chaque année.
«Les personnes qui souffrent de rhumatisme ou d’arthrose en général, viennent souvent pour soulager leurs maux.» Selon notre interlocuteur, les eaux de Hammam Bouhanifia, bien que chaudes, sont bonnes à boire et sont recommandées pour le transit intestinal. Plusieurs affections sont soignées au niveau de cette station, notamment les rhumatologie, la gastroentérologie, la dermatologie, les séquelles de traumatismes articulaires, et les troubles de la circulation veineuse… La pratique de la pélothérapie qui repose sur l'application locale de cataplasmes de boue thermale y est largement usitée. Elle permet de procurer des effets antalgiques et décongestionnants grâce aux principes actifs et très riches contenus dans les oligoéléments (péloïdes). Outre les valeurs thérapeutiques de ces eaux, le Dr Baroudi El-Fachouch explique cet engouement par le fait que «le hammam, chez nous, c’est avant tout une tradition. Les familles apprécient ces endroits pour se reposer.
Il y a un espace qui répond à notre culture. L’avantage, c’est que les stations thermales ou les centres de thalassothérapie sont beaucoup plus fréquentés par les familles. Donc d’un côté, c’est la tradition du hammam et de l’autre, ça répond à notre culture, et c’est ce qui explique cet engouement», a-t-il souligné. Cet engouement s’explique également, poursuit notre interlocuteur, par le fait que les gens ont besoin d’un retour à la nature. «Les gens ont besoin de se détendre et d’être loin du bruit. Donc prendre un bain, se faire masser, c’est très important car c’est un retour aux sources» dit-il. Par ailleurs, il faut dire que le thermalisme dans notre pays n'est pas un phénomène moderne, car l’usage des eaux thermales dans un but thérapeutique remonte à la nuit des temps.
Plus de 4 000 Algériens visitent les centres tunisiens
Si beaucoup d’Algériens choisissent les stations thermales qui se trouvent aux quatre coins du pays, d’autres optent pour les centres de thalassothérapie tunisiens qui sont réputés par la qualité des soins qu’ils proposent. Parmi le million de touristes qui visite chaque année la Tunisie, il y a 4 000 à 5 000 Algériens qui choisissent les centres de thalassothérapie, selon le représentant de l’Office tunisien de tourisme. «Il y a de plus en plus d’Algériens qui visitent nos centres de thalassothérapie et de balnéothérapie. Et cela est très encourageant, car nous sommes très intéressés par la clientèle algérienne. La plupart viennent pour des cures médicales, de détente, ou de bien-être», nous dit Nora Benrais, directrice commerciale et marketing du centre olympe thalasso Spa, situé à Sousse. De son côté, un autre responsable d’un centre de thalassothérapie tunisien, nous a affirmé que son établissement accueille un nombre assez important d’Algériens. «Nous avons une clientèle algérienne très importante surtout en période estivale. C’est une clientèle qui s’intéresse à tout ce qui est soin, thalasso et remise en forme», nous a-t-il affirmé.
Une mise à niveau des stations
Le chantier du thermalisme a été lancé dans les années 1970. Ainsi, l’état de la plupart des stations thermales s’est détérioré. «Ce sont des infrastructures qui datent de plus de 40 ans et ont besoin d’être totalement rénovées et mises à niveau.» nous a expliqué le Dr Baroudi El-Fachouch. Dans ce cadre, notre interlocuteur nous a affirmé que «l’Etat a pris la décision d’accompagner toutes les structures pour leur modernisation, mais aussi sur le plan qualité. Bientôt la station de Hammam Righa va être complètement rénovée et cette opération va se généraliser.» Toujours dans le même ordre d’idées, Mustapha Achouch, assistant du président du directoire chargé de la promotion et du marketing à Gestour, a affirmé dans une conférence qu’il a animée en marge du salon international des vacances, des loisirs et du bien-être, qu’un plan est actuellement en cours d’élaboration pour «faire en sorte que les stations thermales soient rénovées et réhabilitées mais surtout modernisées.» En outre, pour que ces stations soient mises à niveau, il faut accorder une très grande importance à la ressource humaine qui, explique M. Chaoui, «doit être formée à tous les niveaux que ce soit paramédical ou médical. Elle doit également bénéficier d’une formation spécifique qui, à l’état actuel, n’existe pas dans notre pays.» Et pour cela, l’orateur souligne l’importance d’acquérir le matériel adapté à la formation pour proposer les meilleurs soins. C’est dans ce cadre que le ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement – quand il chapeauté également le Tourisme – a mis en place une vaste opération de mise à niveau et de modernisation de l’ensemble des stations thermales, du portefeuille de l’entreprise de gestion des participations tourisme et hôtellerie (Gestour). Ce vaste programme permettra de rendre ces stations conformes aux normes et standards professionnels de l’activité, mais aussi de rehausser leur standing. Ce programme permettra également d’améliorer la qualité des prestations ainsi que les soins prodigués au niveau des stations thermales et centres de thalassothérapie.
Source infosoir Brahim Mahdid
Le Pèlerin