Une présence qui ne fait pas l’unanimité
Une mission de précurseurs de l’UE (Union européenne) sera à Alger à la fin du mois en cours, «à la demande officielle du gouvernement algérien auprès de l’UE pour l’envoi d’observateurs européens lors des élections législatives» afin d’entamer «les discussions avec l’administration algérienne sur les conditions dans lesquelles les observateurs doivent travailler».
L’annonce a été faite jeudi dernier par Mme Laura Baeza, chef de la délégation de l’Union européenne (UE) en Algérie, lors d’une conférence animée à l’école supérieure de journalisme.
En effet, selon le chef de la délégation de l’UE, cette mission de précurseurs élaborera un rapport préalable à la signature d’un mémorandum d’entente consignant les conditions dans lesquelles évolueront les missions d’observation.
A ce titre, la présence des observateurs étrangers garantira- telle réellement la transparence des élections ? Ces délégations étrangères seront-elles fortes en effectif pour être présente dans l’ensemble des bureaux de votes implantés à travers les 541 communes, les 548 daïras dans les 48 wilayas ? Techniquement parlant, la présence d’observateurs étrangers à ces élections législatives attestera-t-elle l’efficacité technique dans le suivi et le déroulement du scrutin ?
Dans cet ordre d’idées, plusieurs questions s’imposent quant aux rôles et aux missions attribués à ces observateurs étrangers afin de contrer la fraude. Ils feront quoi au juste ? Veiller à ce que les candidats aient le même temps de parole et d’analyse dans les médias officiels ? Veiller à la transparence des urnes et à l’intégrité des agents d’administration lors des opérations de dépouillement ?
C’est en effet dans ce contexte politique en effervescence en vue des prochaines échéances législatives, dans un premier temps en tout cas, il semblerait que les différentes formations qui animent la scène politique ne voient toutes d’un bon œil la venue de ces observateurs étrangers. A l’exemple du parti de Louisa Hanoune qui estime que la présence d’observateurs étrangers est «loin de pouvoir garantir la transparence des élections». Pour la SG du parti des travailleurs (PT), «ce ne sont pas les observateurs étrangers qui garantiront la transparence des scrutins mais plutôt le gouvernement qui non seulement veillera à ces élections, devra également préserver la nation». Pour la responsable du PT, afin d’éviter «toute fraude», en plus de «combler les déficits dont souffre la loi électorale» et d’installer «un gouvernement non partisan chargé de préparer les élections», il s’agit de «permettre aux représentants des listes électorales d’être présents dans les commissions administratives». Une vision que partagera à quelques détails prés le mouvement El Islah. En effet, Filali Ghouini, député El Islah, expliquera qu’«à aucun moment nous n’avons demandé la venue d’observateurs étrangers, car ils ne constituent nullement une garantie de transparence des élections». Pour le député, «la garantie première de la transparence de ces élections doit émaner des Algériens en premier lieu», appelant à ce propos à un «encadrement juridique qui se chargera de l’ensemble des étapes du processus électoral, depuis la préparations des listes électorales jusqu’à l’annonce des résultats du scrutin». En outre, El Islah plaidera pour «une institution indépendante» qui se chargera des élections loin de toute influence de l’administration». Enfin, il insistera sur «la présence des représentants des candidats aux élections dans l’opération de dépouillement des urnes».
Moussa Touati, président du FNA (Front national algérien), dira qu’«hormis les lois, en réalité il n’y a personne qui puisse garantir la transparence». Toutefois, il regrettera que «ces lois aient été votées par des députés venus eux-mêmes par la fraude», s’interrogeant alors si «ces lois viennent réellement pallier tous les dérapages ?» Car selon lui, la transparence «est beaucoup plus un problème de moralité et de citoyenneté». Il estimera que «les observateurs étrangers viendront pour donner un rapport à l’Etat, et faire du chantage à ceux qui remporteront les élections». En effet, pour Moussa Touati «les observateurs étrangers ne pourront jamais assurer. Au vu de leur nombre, c’est une mission quasi impossible» que de contrôler la transparence des élections.
Par contre, pour le FLN, «la présence d’observateurs étrangers lors de ces élections sera un témoignage quant à l’opinion internationale sur le bon déroulement et la transparence du scrutin». C’est là l’avis du député FLN et président de la Commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l’APN, Hocine Khaldoun, qui estime que la venue des observateurs étrangers «n’est pas une garantie totale de transparence, mais c’est plutôt les dispositifs mis en place par les autorités (lois, règlements…), notamment la loi sur le régime électoral, qui œuvreront dans ce sens». Pour le député, «la garantie est algérienne», en ce sens où «la responsabilité de la garantie de transparence est en partie partagée entre les partis politiques et l’administration qui se doit d’être impartiale». Kamel Bensalem, secrétaire général du PRA (parti du renouveau algérien), tout en qualifiant d’«historique» les prochaines élections législatives, a estimé que le gouvernement avait donné des garanties qui sont de nature à assurer des élections propres et honnêtes, notamment à travers les instructions données aux walis sur la nécessité d’œuvrer à la neutralité de l’administration. Pour le PRA, les réformes politiques ont apporté des garanties en réponse aux revendications de la majorité des partis politiques en activité ou en cours de constitution. Pour rappel, Mourad Medelci, ministre des Affaires étrangères, avait annoncé au début du mois, lors de son passage sur les ondes de la radio nationale, qu’une mission de précurseurs de l’UE viendra en Algérie pour s’enquérir de l’état de préparation des élections législatives prévues au mois de mai prochain. A ce sujet, le chef de la diplomatie algérienne avait dit alors : «Nous avons donné un préavis de quatre mois à l’UE et nous devons avoir son accord de principe et c’est à partir de là que nous allons, probablement au courant de ce mois ou au plus tard au début du mois prochain, commencer le processus qui va nous conduire à la signature d’un mémorandum d’entente préalable à l’observation». Rappelant dans son intervention que le chef de l’Etat avait donné instruction pour que ces observateurs puissent «travailler en toute liberté et se déplacer avec les effectifs qu’ils peuvent déployer sans contrainte aucune». A noter que la venue de la délégation de l’UE sera suivie par celle de l’ONU, de la Ligue arabe, l’Union africaine (UA) et l’Organisation de la conférence islamique (OCI).
Source Le Jour d’Algérie Lynda Naili Bourebrab
Le Pèlerin