Voilà pourquoi Raouraoua tient à Saâdane
Plus qu’une semaine avant la fin de cette dix-neuvième Coupe du monde. Le rêve d’une consécration d’une sélection nationale africaine a fondu avec l’élimination des Black Stars du Ghana, vendredi soir contre l’Uruguay, à l’issue de la fatidique série de tirs au but. Pendant ce temps, l’Algérie supportrice du Ghana après la sortie prématurée de ses Fennecs attend l’arrivée d’un nouveau-ancien sélectionneur à la barre technique de l’EN.
Dans une semaine, les Algériens gagnés par la folie du football sauront (officiellement) de quel bois se chaufferont les Renards du désert durant les deux prochaines années. La confirmation de Rabah Saâdane ne faisant plus de doute, il s’agira ensuite de connaître les intentions du président de la FAF concernant l’objectif à assigner au nouvel entraîneur. Mais pas seulement. Pas spécialement. Mohamed Raouraoua a d’autres projets que celui de remettre la sélection nationale de football sur le devant de la scène. Il doit, entre autres, mettre en place le premier championnat professionnel, système qui permettrait à l’Algérie de bénéficier de plus d’égards de la part de la Fifa de Sepp Blatter. Le président de la Fédération algérienne de football tient beaucoup à réussir son pari de professionnalisation du championnat national. Quitte à entamer la première édition avec «quelques clubs». Un vœu exaucé dans la mesure où les responsables d’ex-associations à caractère populiste (dénommés Clubs sportifs amateurs) n’ont pas répondu à son appel de mettre sur pied les fameuses entités juridiques commercialement professionnelles (SPA, Eurl et Sarl). Depuis Johannesburg où il exerce ses fonctions de membre d’une commission de l’instance internationale de football, Raouraoua a accordé un nouveau délai de grâce (15 juillet), lui qui insistait sur le fait que les clubs se devaient de s’organiser sous de nouvelles formes avant le 30 juin écoulé. Quinze jours, c’est le temps que le Mondial 2010 prenne sa retraite et libère tout le personnel qui constituait sa cheville ouvrière pour des occupations fondamentales. La gestion des affaires locales étant la principale à cet effet. La tâche qui ne s’annonce pas de tout repos devrait aboutir au lancement, à court terme, du premier challenge national dit professionnel. Avec la promesse de mettre des moyens, beaucoup même si l’on en croit les communiqués réédités de la LNF. La réussite de ce projet de professionnalisation des clubs de football (ou du football tout court), après le retour des Verts dans le concert des grandes nations (du football s’entend), ferait avancer d’autres projets. Comme celui de voir le patron de la FAF postuler à la présidence de la CAF. Cette ambition jamais avouée par Mohamed Raouraoua, lequel a toujours déclaré qu’il soutient Issa Hayatou, l’actuel président de la CAF, dans ses actions en direction du développement du football africain, est désormais une revendication de nombreuses fédérations nationales du continent. Depuis mars 1988 à la tête de la confédération, le Camerounais ne jouit plus, malgré les apparences, de l’aura d’antan. Hayatou, affaibli par sa maladie (il a été hospitalisé de longs jours durant à Accra lors du tirage au sort de la CAN 2010) est aussi, du haut de ses 64 ans, un homme seul.
La présidence de la CAF en ligne de mire
L’enfant de Garoua n’est plus ce lion qui trônait tel un roi sur l’Afrique. Réélu jusqu’en 2013 pour un sixième mandat à la présidence de la CAF, Hayatou est en train de préparer sa succession. En douceur. A en croire des personnalités très écoutées au sein de l’instance africaine, Hayatou verrait bien Mohamed Raouraoua lui succéder. Juste renvoi d’ascenseur pour une fédération, celle d’Algérie en l’occurrence, qui a pesé de tout son poids lors du congrès électif de Casablanca. Belaïd Lacarne, alors président de la FAF, a mis du cœur à l’ouvrage pour inciter les Africains à voter Hayatou. L’exclusion du Somalien Farah Addo des rangs de la Fifa a affaibli le Camerounais qui, à l’époque, ciblait carrément le poste de Blatter. Addo est quand même resté un proche collaborateur de Hayatou, soulevant l’ire des responsables de l’instance internationale mais également des fédérations nationales d’Afrique. Le Camerounais connaît la force de Raouraoua dans l’entourage de Blatter. Raouraoua a réussi à passer des projets de loi au sein de la Fifa (les footballeurs binationaux, entre autres) grâce à la «compréhension» du Suisse. Hayatou sait pertinemment que l’Algérien est écouté tant au niveau du Maghreb et de l’Afrique du Nord (excepté peut-être en Egypte) qu’au niveau des fédérations d’Afrique noire. Des associations qui ne manquent pas d’épingler la «dictature » du Camerounais. «Hayatou croit qu’il est la CAF. Et beaucoup de présidents de fédérations africaines considèrent que la CAF appartient à Hayatou et à son entourage», disent de lui certains de ses compatriotes dont le bouillonnant Joseph-Antoine Bell, l’ex-portier des Lions indomptables. Celui-ci persiste à croire que Hayatou est quelqu’un de sourd et qui n’entend nullement «reconnaître ses erreurs». Décrié par ses pairs, outre ses ennemis de tous les instants, Hayatou songe à sortir du circuit avec les honneurs d’un seigneur. Remettre les clés de la CAF, dont le siège est situé à la cité du 6- Octobre au Caire, à quelqu’un qui a prouvé ses «grandes qualités» de manageur et qui est très apprécié dans les cercles décisionnels de la Fifa, de la CAF, de l’UAFA et de l’UNAF de l’AFC présidée par le Qatari Mohamed Bin Hammam serait la dernière volonté de Hayatou. C’est cette dynamique de continuité qui dicte la démarche de Raouraoua. Reconduire Rabah Saâdane, au lieu de s’aventurer à aller dénicher un nouveau sélectionneur qui aura une marge de manœuvre très limitée, l’occupera dans la concrétisation de ses projets fondamentaux. Plaire à la Fifa, en concrétisant une de ses recommandations (professionnalisation du championnat) après avoir conquis les suffrages de ses pairs du CE de la CAF, est le seul moyen pour gravir les hautes fonctions du football africain. En 2013, lors de la CAN libyenne, Hayatou aura consommé son sixième et probablement dernier mandat à la tête de la CAF. Raouraoua veut aller à Tripoli dans la peau de président de la Fédération dont la sélection est tenante du titre. Tout simplement en fixant à Saâdane comme objectif de gagner la CAN 2012 co-organisée par la Guinée-Bissau et le Gabon.
Source Le Soir d’Algérie M.B.
Le Pèlerin